Sans grande surprise, le Parlement européen a adopté une résolution en demi-teinte concernant le système Echelon. Tout en appelant à la création de son propre système d’écoute et d’interception des télécommunications.
Par 367 voix contre 159 et 34 abstentions, le Parlement européen a adopté ce 5 septembre une résolution suite au travail de la commission temporaire sur le système Echelon. Sans surprise, le texte est en demi-teinte. Les eurodéputés réaffirment ainsi : "L’existence de ce système d’interception ne fait plus aucun doute et est le résultat d’une coopération entre les ...tats-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, dans le cadre de l’accord UKUSA. Il est utilisé pour intercepter des communications privées et économiques et non à des fins militaires. Les capacités de ce système ne sont pas aussi vastes que ce que certains ont parfois affirmé. Il est nécessaire de généraliser le plus possible le système de cryptage et les institutions européennes devraient donner l’exemple d’une telle utilisation." Orientant clairement ses conclusions sur un plan économique, et non sur celui des droits de l’homme, Gerhard Schmid, rapporteur de la commission, rappelle que "les détails qui sont transmis à l’industrie nationale privée (américaine) représentent une forme de subvention scandaleuse et inadmissible à tous égards". Pour les ...tats-Unis, nation championne de la dérégulation et de la lutte contre l’...tat providence, une telle implication gouvernementale aux côtés du secteur privé relève effectivement d’une forme particulièrement schizophrène de la libre concurrence des marchés.
La mondialisation des écoutes
Même timide, la résolution a réussi à faire grincer les dents d’eurodéputés. Souvent, d’ailleurs, pour des raisons opposées. L’attaque la plus virulente émane de Jean-Charles Marchiani. L’ex-préfet du Var, ami de Charles Pasqua et grand connaisseur des Alain Krivine, porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), dénonce ce qu’il appelle "une mondialisation des écoutes comme il y a une mondialisation des échanges économiques". Et d’avertir : "Il ne faut pas que l’Europe devienne complice et victime d’un tel système." Le débat sur Echelon fut en effet l’occasion pour les eurodéputés d’en appeler à la création d’un système d’écoutes et d’interceptions propre à l’Europe. Une proposition soutenue par Enfopol, le groupe de travail des forces de l’ordre européennes qui mène un intense lobbying en ce sens.
Qui va contrôler les contrôleurs ?
Pour Jan Marinus Wiersma, vice-président néerlandais du Parti socialiste européen : "Il est nécessaire de faire preuve de clarté et de créer un système de renseignements européen efficace." Même son de cloche pour Annemie Neyts-Uyttebroeck, eurodéputée libérale belge qui s’exprimait au nom du Conseil : "En ce qui concerne le problème du renseignement, il est absolument indispensable que l’Union européenne elle-même dispose d’un système plus performant et qu’elle développe ses propres capacités de recherche dans ce domaine, mais elle devra exercer un contrôle démocratique." Un non-sens pour Patricia McKenna, eurodéputée verte irlandaise, pour qui il faut "exiger très fermement le respect de la vie privée et [empêcher] le contrôle permanent des activités des citoyens". Malicieusement, l’écologiste a ajouté : "Avec un contrôle démocratique, tout devrait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes." Car, comme le rapportait Gerhard Schmid, "en fait, toute la question est de savoir qui va contrôler les contrôleurs ?"