Pour le pouvoir militaire de Rangoon, l’Internet est un enjeu de première importance : il sert de caisse de résonance à la dissidence birmane à l’étranger. Le site Free Burma Coalition relie, par exemple, un réseau de mouvements d’opposition en exil, en Thaïlande, au Japon et en Occident. La mailing-list Burmanet, basée au Japon, diffuse chaque jour, depuis 1994, des informations sur la situation birmane à des milliers d’internautes. L’organisation non gouvernementale Burma Project équipe en ordinateurs les ethnies Karen et Mon, réfugiées à la frontière birmano-thaïlandaise. L’opposante birmane Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991, a son propre site de soutien, géré depuis l’étranger.
En réponse à cette mobilisation, la junte a développé, dès 1996, un site de propagande, myanmar.com. Le régime se sert aussi du Réseau pour tenter de discréditer l’opposition politique, notamment les membres de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), par des envois massifs de mails de désinformation. Le ministère de la Défense et les services de renseignements surveillent le Net et adressent des messages truffés de virus aux dissidents birmans actifs sur la Toile. En réponse, des partisans de la LND ont piraté le site officiel du pouvoir.
Au Myanmar, les Birmans n’ont aucun accès à l’Internet. Seuls quelques privilégiés (entrepreneurs et proches des généraux au pouvoir) peuvent se connecter, via l’opérateur national, le MPT (Myanmar Post and Télécommunications). Un membre du NCGUB (National Coalition Government of Union of Burma), le gouvernement provisoire en exil, explique qu’en fait, en Birmanie, " les utilisateurs d’Internet se connectent à une sorte d’Intranet contrôlé par la junte. "
En décembre 1999, six militaires birmans ont été arrêtés, accusés d’avoir enfreint les dispositions concernant l’usage de l’Internet : un colonel a notamment été incarcéré pour " viol de secret d’...tat ", après qu’il avait téléchargé des informations sur le site d’opposition Burmanet. A la même période, le fournisseur de services e-mails, Eagle IT, a également été fermé, et son personnel interrogé par les services de renseignements militaires. Depuis mai 2000, le ministre des Communications a interdit aux étrangers d’utiliser des services de mails privés. Tous les courriers transitent désormais par le MPT qui, selon plusieurs témoignages, les examine systématiquement. Le 20 janvier 2000, des nouvelles dispositions ont été prises par le MPT : les écrits traitant de politique sont interdits sur le Réseau. Les comptes Internet ne peuvent plus être partagés et la création de pages web est soumise à autorisation.
Une loi de 1996 prohibe toute utilisation, détention ou importation d’un télécopieur ou d’un modem sans autorisation de l’administration. En cas d’infraction, le coupable risque quinze ans de prison. Selon le journal pro-gouvernemental anglophone, New Light of Myanmar, une peine analogue vise celui qui crée un lien sur un site sans autorisation, ou utilise le Réseau " pour miner la sécurité de l’...tat, l’ordre et la loi, l’unité nationale, la culture et l’économie nationale ".
Fiche technique :
Population : 44,5 millions d’habitants
PIB par habitant et par an : 997 dollars
Population urbaine : 27,3 %
Fournisseurs d’accès à Internet : 1
Internautes : environ 1 000