Le tribunal de Nanterre a annulé la marque E-Learning. C’est pourtant la société E-Learning qui avait attaqué l’entreprise Elearning Agency pour contrefaçon et concurrence parasitaire.
La société E-Learning a fait la douloureuse expérience de l’effet boomerang. Créée en mars 2000, cette entreprise de production de contenus pédagogiques spécialisés pour la formation en ligne avait déposé le 7 avril 2000 la marque E-Learning auprès de l’INPI (institut national de la propriété industrielle). En juillet 2000, c’est au tour de la société E-learning Agency, également active dans le secteur de la formation en ligne, de faire enregistrer sa marque à l’INPI. Un an plus tard, en juillet 2001, elle reçoit un courrier recommandé en provenance des avocats de E-Learning : une mise en demeure de cesser d’utiliser la marque et le nom de domaine sur Internet E-learning Agency, pour cause de contrefaçon et de concurrence parasitaire.
"Dans un premier temps, nous avons tenté de nous arranger à l’amiable, en leur proposant d’inclure sur la page d’accueil de notre site un petit texte pour faire clairement le distingo entre nos deux sociétés", raconte Philippe Lacroix, fondateur de E-learning Agency. Tentative infructueuse, puisque sa société se retrouve assignée en justice, devant le tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre le 28 août 2001. E-Learning demande l’annulation de la marque E-learning Agency, l’interdiction d’utiliser cette dénomination ainsi que ce nom pour l’adresse du site Internet, le tout assorti de 200 000 francs de dommages et intérêts. "Nous trouvions leur demande totalement injustifiée et nous avons donc décidé de nous défendre", explique Philippe Lacroix. Sa première initiative est de demander à paraître au procès comme "intervenant volontaire", puisque c’est lui, et non sa société, qui détient la marque E-learning Agency. La deuxième étape consiste à réunir une imposante documentation pour prouver que E-Learning est un terme générique pour désigner la formation en ligne et ne peut donc être déposé comme marque. Par conséquent, dans ses conclusions déposées à l’audience, E-learning Agency demande que le tribunal prononce la nullité de la marque et réplique en demandant, à son tour, des dommages et intérêts équivalents à ceux qui lui sont réclamés.
Le 19 novembre 2001, le TGI de Nanterre lui a donné raison, estimant que l’expression e-learning était déjà un terme générique en avril 2000. Une gifle pour E-Learning, qui n’a pas souhaité répondre aux questions de Transfert. Le tribunal, pour justifier sa décision, s’est notamment appuyé sur l’annonce, largement reprise par la presse, du lancement du programme européen "Initiative e-Learning", en mars 2000. Logiquement, le tribunal a alors prononcé la nullité de la marque "" pour la classe 41 (celle du secteur de la formation), tout en maintenant la validité pour les classes 35 (publicité, gestion des affaires commerciales, travaux de bureau) et 38 (télécommunications). En revanche, les juges n’ont pas souscrit à la demande de dommages et intérêts de la société E-learning Agency. "Ce n’est pas ce qui nous intéressait, nous les avions demandés pour répondre point par point à leur attaque", affirme Philippe Lacroix. Il ne compte pas réclamer à E-learning le paiement de ses frais de justice, alors que le tribunal lui en a donné l’autorisation. De même, E-learning Agency n’a pas l’intention de déposer un recours auprès de l’AFNIC (l’instance qui régule les noms de domaines en .fr) pour interdire à la société E-Learning l’utilisation du nom de domaine e-learning.fr. "Nous ne cherchons absolument pas à leur nuire. Notre secteur d’activité est suffisamment vaste pour que nous puissions coexister, et que le meilleur gagne", conclut Philippe Lacroix.