Pinceaux et pincettes sont dans un labo...
L’Ecole supérieure d’art et de design de Zurich (HGKZ), en Suisse, prépare l’ouverture à la fin de l’été 2003 d’une résidence pour artistes, baptisée Artists in Swiss Science Labs (AIL). Objectif : ouvrir la porte des laboratoires de recherche à des créateurs pour mettre à leur disposition un environnement scientifique et technique de pointe.
"Il s’agit d’instaurer un dialogue, voire des collaborations, entre artistes et scientifiques", annonce sobrement René Stettler. Cet artiste spécialisé dans les nouveaux médias, fondateur du Symposium biennal des sciences, techniques et esthétique de Lucerne (Suisse) est aujourd’hui le coordinateur du programme AIL.
Si des labos spécialisés dans les biotechnologies, l’informatique ou l’intelligence artificielle sont d’ores et déjà associés au programme AIL, Stettler et son équipe recherchent actuellement des fonds, publics et privés, indispensables au fonctionnement de leur résidence.
Retard suisse
Pour les initiateurs du projet, il y a urgence car la Suisse, "pourtant dotée de laboratoires scientifiques parmi les plus réputés au monde", souffrirait, selon eux, d’un important retard dans le domaine de ces résidences mélant art et sciences.
Ce genre de collaboration a en effet déjà été éprouvé avec succès sur plusieurs campus de la planète. Aux Etats-Unis, le prestigieux Massachussets Institute of Technology (MIT) de Boston et l’Exploratorium, le musée de la science de San Francisco, accueillent ainsi, tous frais payés, des artistes soucieux d’interroger la science.
En Europe, l’exposition itinérante "Signature de l’invisible" est le fruit de la collaboration entre les chercheurs du Centre européen de recherche nucléaire (Cern) de Genève et des artistes du London Institute d’art et de design.
Dans le domaine des sciences du vivant, le collectif australien Symbiotica
a pris ses quartiers au cœur de l’Institut d’anatomie et de biologie de l’université occidentale d’Australie. Ses artistes résidents y ont accès à un matériel sophistiqué : chambres noires, imagerie bio-moléculaire, outils de recherche sur l’ADN... Depuis 1996, l’artiste Oron Catts a ainsi pu développer un travail pointu, érigeant la technique de culture cellulaire en support artistique.
Afflux de candidatures
De passage en France pour y présenter ses "poupées du souci" et "steaks de grenouille", Oron Catts confiait voir dans cette collaboration entre scientifiques et artistes une façon de sortir les objets de recherche - la transgenèse par exemple - de l’atmosphère confinée des laboratoires, pour les livrer au débat public.
La pertinence de cette démarche trouve aussi confirmation, selon les responsables d’AIL, dans le rythme soutenu auquel les dossiers de candidatures parviennent au HGKZ. "160 dossiers d’artistes et de scientifiques ont été enregistrés à ce jour, confie René Stettler. Au final nous pensons démarrer l’expérience avec un maximum de 6 artistes-résidents ."