Emmanuel Vandamme a lancé un réseau de coopératives spécialisées dans le multimédia.
Votre réseau favorise l’existence d’un « tiers-secteur électronique ». Qui rassemble-t-il ?
L’idée est partie de plusieurs SCOP [Sociétés coopératives de production] spécialisées dans le multimédia qui avaient toutes besoin d’une personne compétente dans le référencement des sites. On a décidé d’embaucher quelqu’un en commun. Dans la foulée, nous avons créé un réseau pour échanger nos compétences, car nous partageons certaines valeurs : le refus de la spéculation, la volonté de répartition équitable des bénéfices. Maintenant, notre cercle va s’élargir au secteur associatif, aux organisations portées sur un Internet solidaire. On veut éviter que le Net soit squatté par le business et la spéculation.
Qu’apportera ce réseau au tiers-secteur ?
Il s’agit de mutualiser les investissements et d’échanger des infos. Nous allons mettre en place un service d’hébergement. Pour des questions d’indépendance et parce que tout le monde bénéficiera d’économies d’échelle. Nous comptons aussi créer des incubateurs pour soutenir des projets solidaires.
Et ces solutions n’existent pas ailleurs ?
Certainement. Mais il n’y a pas de réseau qui associe l’aspect technique à la volonté de développer un Internet solidaire et citoyen.
En somme, vous voulez professionnaliser le secteur associatif du Net, l’aligner sur le secteur commercial ?
Il ne faut pas que l’aspect solidaire devienne une excuse pour faire les choses moins bien. On ne peut pas accepter que les sites du secteur associatif soient plus lents à charger ou que les solutions de paiement soient moins sécurisées. L’exigence de solidarité va de pair avec une exigence d’efficacité. Par exemple, à quoi bon faire du commerce équitable en ligne, sans se donner les moyens techniques de le développer ?
Il vous faudra aller vite...
Il y a urgence, c’est vrai. Il y a vraiment des parts de marché à prendre. Si le tiers-secteur n’est pas présent en ligne aujourd’hui sur des questions comme le commerce équitable ou les énergies renouvelables, celles-ci risquent d’être récupérées par le business. D’ailleurs, certains domaines me semblent déjà perdus. L’enseignement, par exemple.
Avez-vous l’intention de proposer un hébergement gratuit, pour les webzines par exemple ?
On a envie d’accueillir des webzines. Mais je m’interroge sur le modèle économique de l’hébergement gratuit. Altern avait une posture assez radicale : la gratuité totale. Au final, c’est dur à tenir. Personnellement, je pense préférable qu’il y ait une relation économique, même s’il s’agit de payer 10 francs par mois, car héberger des sites a un coût. Je ne suis même pas opposé par principe à la pub. On peut créer une charte rigoureuse sur la pub et rémunérer certains sites de cette façon. Le point de vue des SCOP, c’est de refuser l’économie ultra-libérale, la spéculation, la course aux bénéfices, pas l’économie en soi.