Le 12 octobre 1999, le général Pervez Musharraf a renversé le Premier ministre Nawaz Sharif, notamment accusé de multiples atteintes à la liberté d’expression. Ce jour-là, le Pakistan est coupé du monde pendant plusieurs heures. Les militaires ont tout simplement débranché l’Internet. La loi martiale est, de nouveau, en vigueur mais la loi sur la presse, très restrictive, est suspendue.
Prévue pour entrer en vigueur avant 2002, la nouvelle loi sur les Technologies de l’Information stipule, dans son chapitre Internet, que " pour permettre à un opérateur libre de fonctionner, un niveau minimum d’intrusion sera permis, en termes de surveillance et de filtrage de tous types de communication ". Ce qui pourrait autoriser un contrôle de la part notamment des services secrets omniprésents dans le pays.
L’association de journalistes Pakistan Press Foundation rapporte qu’en 1996, Digicom, le plus important fournisseur d’accès pakistanais, a demandé à ses clients de signer un contrat autorisant la police à lire leurs communications. Les utilisateurs devaient également s’engager à ne pas utiliser de cryptographie et à fournir une copie de leur carte d’identité à Digicom, utilisable en cas de poursuite.
En juillet 2000, le quotidienDawn a révélé que la Pakistan Telecommunication Corporation Limited(PTCL, entreprise publique en situation de monopole) était en train de mettre en place deux nœuds de connexion à la Toile (National Access Points) par lesquels les fournisseurs d’accès devront obligatoirement passer. Cette mesure permettra à cette entreprise publique de bloquer définitivement l’accès aux sites pornographiques et le passage des communications téléphoniques établies via l’Internet. Certains journalistes ont affirmé que la stratégie de PTCL était avant tout de défendre son monopole sur les appels téléphoniques. Ainsi, en 1999, le site www.dialpad.com a été bloqué car il proposait des appels gratuits vers les Etats-Unis.
Les autorités d’Islamabad se tiennent prêtes à toute éventualité. Ainsi, un ingénieur de Paknet, le fournisseur d’accès public, affirmait, en avril 2000, qu’il disposait du matériel nécessaire pour bloquer n’importe quel site sur ordre des autorités. " Mais nous ne l’avons jamais fait ", ajoutait-il.
L’aversion pour l’Internet des miliciens taliban, au pouvoir en Afghanistan, a eu des répercussions au Pakistan où ils jouissent de nombreux soutiens. Ainsi Rawa, une organisation de femmes afghanes contre le fondamentalisme, a affirmé être victime de menaces par e-mails, qui viseraient notamment les responsables de leur site Internet, hébergé au Pakistan. Des internautes suspectés d’être proches des taliban ont également mis en ligne deux sites insultants les femmes de Rawa. Ils ont disparu après quelques semaines, suite à de nombreuses protestations.
Fiche technique :
Population : 148 millions
PIB par habitant et par an :1 715 dollars
Fournisseurs d’accès à Internet : environ 50
Internautes : 200 000
Le gouvernement a affirmé, en novembre 2000, avoir dépensé plus de quatre-vingts dix millions d’euros et avoir baissé de 55% le prix des connexions, afin de favoriser le développement de l’Internet. Trois cents villes sont déjà connectées à la toile.