Les récompenses Internet décernées cette année au célèbre festival d’art numérique confirment que la performance technique s’impose de plus en plus en tant que critère d’évaluation. Ce qu’un bon nombre d’artistes conteste...
Une fois de plus, cette année, les prix Ars Electronica, les Oscars de l’art numérique, ont privilégié la technique au détriment du reste. Les grands vainqueurs de l’édition 2001 s’appellent Banja, le célèbre jeu interactif, et Praystation, une animation de l’artiste new-yorkais Joshua Davis. Le perdant, pour un bon nombre d’artistes, pourrait être le prix d’ Ars Electronica lui-même. L’art de demain ? C’est le thème du festival de cette année et à la vue des résultats, pour le prix Internet en tout cas, c’est le Flash qui préfigure le mieux l’avenir. Banja, le vainqueur du prix Net Vision, mais aussi Phantasy Star Online, son dauphin, sont les dignes représentants d’un Flash de haut niveau. De même pour Praystation, vainqueur du prix Net Excellence, qui présente des animations Flash très pointues. On retiendra aussi les places d’honneur de Imahima, un système de message sur téléphone portable, dans la catégorie NetVision, et celles de Manhattan Timeformations et de Warp Records dans la catégorie Net Excellence. Un bilan qui confirme globalement la tendance des deux dernières années : la prédominance de la qualité des animations comme critère d’évaluation des œuvres. Et ce, malgré les ajustements effectués par les dirigeants du concours, qui ont limité le vote du jury (critiqué les années passées) aux admissions officielles. Désormais, le jury, qui présélectionnait et votait à la fois, doit se prononcer sur une liste élargie par le choix d’un groupe d’"experts".
En perte de reconnaissance
Certains, comme Timothy Druckrey, conservateur indépendant à New York, mettent en cause le fait d’avoir trop misé sur le côté technique. "Beaucoup de pensées se sont développées en partant du principe que le secret de l’art est technique, que le logiciel peut être de l’art. Mais la technique n’est qu’un moyen vers une fin", a-il affirmé au New York Times. Une critique partagée par un bon nombre d’artistes. Mark Tribe, le fondateur de Rhizome, affirme qu’ "Ars Electronica n’a pas réussi à faire de son prix la récompense pour la communauté du Net-Art". D’autres vont plus loin dans la contestation. Conor Mc Garrigle, un artiste irlandais, a ouvert sur son site stunned.org un concours bidon où George Bush ( qui "travaille avec succès sur la réalité virtuelle") fait partie des nominés, au même titre que des pizzas à emporter ( sans lesquelles "beaucoup seraient mort devant leurs ordinateurs"). Toutes ces critiques sont balayées par Christine Schöpf, l’une des organisatrices autrichiennes : le prix doit récompenser une démarche artistique, consciente ou non, et plus généralement l’influence de la technologie sur la société ou l’économie. Sentiment partagé par Bruno Beusch, fondateur de TNC Network avec Tina Cassani, pour qui la récompense n’est pas un prix "artistique, mais un prix pour tout un spectre d’innovations sur et avec l’ Internet". En tout cas, le défi pour les prochaines éditions reste de repréciser le statut du concours, pour le moins en perte de lisibilité et de reconnaissance. Enfin, ironie du sort, précisons que Joshua Davis, le vainqueur de l’Excellence Prize, donc de 10 000 euros, se situe plutôt du côté des sceptiques. Ce sont les experts qui ont sélectionné son œuvre, et non lui qui l’a soumis au jury. Pourquoi ? "Le Prix Ars, je n’en connaissais pas grand chose", a t-il affirmé au New York Times.
Les vainqueurs :
Net Vision Price
1er prix :
Banja : http://www.banja.com
Places d’honneur :
Phantasy Star Online : http://www.sega.com/sega/game/pso_launch.jhtml
ImaHima : http://shiva.imahima.com
Net Excellence Prize
1er Prix :
¦P¦R¦A¦Y¦S¦T¦A¦T¦I¦O¦N¦ : http://www.praystation.com
Places d’honneur :
Warprecords : http://warprecords.com
Manhattan Timeformations : http://www.skyscraper.org/timeformations