Usenet, le pionnier des espaces de débat sur internet, vient de se voir doté de la hiérarchie france.*, composée d’une centaine de nouveaux forums régionaux et de proximité.
Alors que Jacques Chirac aurait, selon le Canard Enchaîné de ce 4 juin 2003, déclaré qu’"il commence à nous emmerder sérieux, Raffarin, avec sa décentralisation", Stéphane Marchau, un informaticien français comptant parmi les principaux acteurs francophones d’Usenet, annonçait le même jour la création de 118 forums de discussion (ou newsgroups) régionaux et locaux de type france.ile-de-france.paris, france.corse, france.pays-de-la-loire.nantes, france.polynesie, etc.
Viendront ensuite, en fonction de la demande des utilisateurs, des sous-groupes tels que france.ile-de-france.paris.loisirs, france.ile-de-france.paris.social, france.ile-de-france.paris.politique, etc. Les forums devraient d’ici peu être disponibles auprès des principaux fournisseurs d’accès à internet (FAI) de sorte qu’on puisse y accéder via son logiciel de news ou de courrier électronique (voir Configurer son logiciel pour accéder à des serveurs de News).
Un geste politique
Stéphane Marchau, qui avait créé, en l’an 2000, mes-news.com, "client de news adapté au web et permettant de lire et de poster sur Usenet", ne le fait pas pour l’argent, mais bénévolement, à l’instar de la quasi-totalité des principaux acteurs de Usenet.
Version technologique des agoras, les newsgroups répondent en effet au désir de nombre d’informaticiens et férus de nouvelles technologies de mettre à disposition des citoyens des espaces ouverts de parole. Ils permettent tout autant de confronter des idées que de s’entraider et constituent une base de connaissance unique en son genre : les contributeurs y débattent ou répondent à des questions inédites ou fréquemment posées, le tout gratuitement.
Loin d’être une simple annonce technique, le développement de Usenet revêt un caractère politique. Contrairement aux listes de discussions "classiques", ainsi qu’aux forums hébergés sur le web, personne ne contrôle Usenet, ou, plus précisément, ce système est tellement décentralisé qu’il est quasiment impossible d’empêcher quiconque de s’y exprimer, d’autant que les forums sont généralement non-modérés. Quand on connaît l’état de soumission des médias régionaux aux principaux acteurs politiques et économiques locaux, l’apparition de ces nouvelles agoras "de proximité" pourrait donc contribuer à ouvrir le débat.
Un peu d’histoire
Créé en 1979, Usenet abriterait aujourd’hui plusieurs dizaines de milliers de forums de discussion thématiques. Usenet n’est contrôlé par personne en particulier : si chacun, pourvu qu’il ait quelques compétences techniques, peut y lancer son propre forum de discussion, on ne peut pas pour autant parler de "directeur de la publication".
La création d’un forum est avant tout une opération technique : les feeds de news sont relayés dans le monde entier par les fournisseurs de services internet (FSI), et il est presque impossible d’en empêcher la propagation.
Système décentralisé, Usenet n’est en pas moins très structuré. Ainsi était annoncée il y a 10 ans, le 10 mars 1993 exactement, la création de la "hiérarchie" francophone fr.*, composée à ce jour de 333 forums de discussion tels que fr.bienvenue, fr.bio.medecine, fr.misc.bavardages.linux ou fr.soc.politique.
Les forums en fr.* ayant vocation à couvrir tous les pays francophones, selon Stéphane Marchau, il n’entrait pas dans les attributions de cette hiérarchie d’accueillir de nouveaux groupes franco-français à thématiques régionales ou de proximité.
Rebondissant sur le refus, par la communauté francophone de Usenet, de la création du forum fr.soc.culture.corse en mai dernier, Stéphane Marchau, qui attendait "le bon moment", vient donc de créer la hiérarchie france.* couvrant l’ensemble du territoire français. Selon lui, les premiers messages passés sur france.* sont d’ailleurs des posts en relation avec la Corse.